Printemps 2012. « Merah est un héros, Merah est un martyr de l’islam. » Quand la mère d’Imad est accueillie dans la cité toulousaine des Izards, où le terroriste Mohamed Merah a grandi, ce sont ces propos qu’elle entend. A l’époque, cette mère en deuil n’a qu’une obsession : comprendre pourquoi son fils a été pris pour cible par le « tueur au scooter » ce 11 mars 2012. Imad, parachutiste sous-officier, avait 29 ans.
Quarante jours après la mort du deuxième de ses cinq enfants, le 20 avril 2012, Latifa Ibn Ziaten fonde l’association Imad pour la jeunesse et pour la paix. Et part à la rencontre d’une jeunesse qu’elle dit « perdue », parcourant écoles, prisons et foyers sociaux. Son combat, sa religion, sa république, ses espoirs : quatre ans plus tard, le message n’a pas dévié d’un iota. Entre bienveillance et gravité, sans jamais hausser le ton.
Le 18 février 2016, lorsqu’elle dévoile sur la façade du bâtiment la plaque qui porte le nom de son fils, la Franco-Marocaine n’affiche pourtant plus la même placidité. C’est dans un petit local, en plein cœur d’un quartier populaire de Garges-Lès-Gonesse que Latifa Ibn Ziaten a décidé d’ouvrir la première maison « Imad » pour la jeunesse et les parents.
J’inaugure la maison Imad pour la jeunesse et les parents à Garges. pic.twitter.com/iGy8jBPFmO
— Latifa Ibn-Ziaten (@Latifa76300) February 16, 2016
Dans cette maison, Latifa Ibn Ziaten veut aider à la fois les jeunes, tentés par la radicalisation religieuse, et leur famille. Depuis son arrivée en France à l’âge de 17 ans, elle a travaillé pour la municipalité de Rouen puis au musée des Beaux-Arts comme standardiste. Mais jamais comme éducatrice.
Dans son combat contre la radicalisation, Latifa Ibn Ziaten n’est pas seule. Des psychologues, des éducateurs et 18 bénévoles vont se relayer auprès d’elle. Parmi eux, Yassine, un jeune étudiant de 19 ans qui habite le quartier. D’un optimisme exacerbé, il vante la chance qu’il a d’habiter en France.
A Garges-lès-Gonesse, officiellement, aucun jeune n’est parti faire le djihad en Syrie. Mais pour le maire Maurice Lefrève, qui a mis à disposition le local de l’association, le risque est toujours présent.
D’autres maisons vont être créées en France. L’initiative devrait par ailleurs s’exporter. Après des visites à Bamako (Mali) et à Tel-Aviv (Israël), l’installation d’une première maison est finalement prévue… au Maroc.
Lire le second épisode : Latifa Ibn Ziaten : « J’ai pardonné à Merah ce qu’il était, mais pas ce qu’il a fait »